Si j’ai croisé de nombreuses mosaïques d’Invader depuis des années, le véritable point de départ de ma dernière folie ludique date précisément du 13 novembre 2016, il y a quatre ans, le jour de l’installation de FlashInvaders sur mon téléphone. Récit de quatre années de jeu, de recherches, de rencontres…
Comme je l’écrivais dans FlashInvaders, le street art est une drogue, l’artiste Invader a eu la très bonne idée de lancer en 2014 l’application FlashInvaders. C’est un exemple de Gamification (ou Ludification pour éviter l’anglicisme même s’il est plus courant) parfaitement réussie. Avec cette appli, les amateurs de Street Art deviennent joueurs et plus seulement spectateurs. Et tous les codes du jeu sont là, les points, les scores, jusqu’au classement mondial des flasheurs et la petite montée d’adrénaline quand le classement évolue.
J’ai réussi à résister et ne pas être obsédé pendant mes deux premières années. J’avais déjà d’autres passions geolocalisées et je ne voulais pas tout cumuler, j’avais donc moins d’une dizaine de flashs par mois, au gré des hasards de mes promenades dans Paris. En vacances à l’étranger, seuls un ou deux flashs me suffisaient, comme à Berlin ou Hong Kong. A l’automne 2018, j’atteignais donc à peine la centaine de flashs.
Cartographier les œuvres
La folie guettait, sournoise, et j’aurais dû me méfier au printemps 2018 lors de la création de ma première carte des Invaders parisiens. Je voyais ça comme un loisir un peu geek, le plaisir de rechercher et reconnaître les emplacements depuis des photos, mélangé au plaisir du développement logiciel pour agréger des données de sources différentes et générer une cartographie. Mes copains geocacheurs plongeaient de plus en plus dans ce monde des Invaders, mais je pensais pouvoir résister.
Tout a dérapé en octobre 2018 quand j’ai trouvé le moyen d’importer ma carte directement dans Cachly, l’appli que j’utilisais jusque-là pour le Geocaching. J’avais toutes mes données au même endroit, photos comprises, je pouvais facilement marquer les mosaïques déjà rencontrées et m’organiser des sorties dans l’unique but de flasher. Mon rythme mensuel s’est alors multiplié par dix, et est resté quasiment constant pendant deux ans, en dehors du confinement.
Les premiers jalons sont tombés, atteindre les 10.000 points, flasher 1000 Invaders, entrer dans le top 1000, se rapprocher du top 500, tout ça rendant le jeu encore plus excitant. Et toute période sans flash se payant immédiatement, avec une chute inéluctable dans le classement.
Situations étranges
Une fois les Invaders parisiens les plus accessibles flashés, l’appel du score et de la curiosité m’a poussé à continuer, au risque d’oublier le Street Art pour ne plus penser qu’aux flashs, de ne plus me laisser le temps d’admirer les œuvres. Entrer dans un restaurant, un bar, un musée quelques secondes, ou une piscine en étant tout habillé, est devenu presque normal puisqu’il y avait un Invader.
Mes pauses déjeuner sont devenues des traversées de Paris, juste le temps de flasher deux ou trois œuvres, de retirer une affiche qui masquait un Invader, de gratter les traces de colles pour en rendre un flashable…
Si je me moquais à une époque des copains et copines qui passaient leurs week-ends sur les autoroutes d’Ile de France, sans aucun doute les endroits les plus bucoliques de la région, je n’allais pas tarder à faire la même chose. Le plaisir inimitable de la promenade le long de la bande d’arrêt d’urgence.
Rencontres impromptues
A force de me promener d’un bout à l’autre de Paris et de la région parisienne, j’ai fini par tomber par hasard sur des joueurs, dans de multiples circonstances bizarres.
Une anecdote est assez représentative de cette folie. En février 2020, je pars flasher les quelques Invaders de l’A86 Est. Pour atteindre PA_526, je me gare le long de l’autoroute, traverse un camp de caravanes dont les habitants m’ignorent, et dévale un talus pour me rapprocher de l’Invader. Après avoir réussi à le flasher, je me retourne et je vois arriver à une centaine de mètres un groupe qui me regarde avec des grands sourires. Qui d’autre que des flasheurs pouvaient se balader dans un tel environnement ? Ils étaient une petite dizaine, guidés par Doud1er, et ils venaient justement de se dire qu’ils ne croisaient personne sur les flashs. J’ai fini la sortie sur d’autres Invaders avec eux, un très bon souvenir.
Et que dire des fois où l’appli fait son « tut-tulu-lulu » caractéristique d’un flash, et qu’un passant non loin se retourne dans la rue en disant « Il y a un Invader ici ? ». Ou de la rencontre du premier du classement sous un déluge de pluie et de vent en haut de la tour Eiffel… Des réactivateurs croisés le matin qui viennent admirer leur œuvre de jour (merci à eux)… Des sourires de connivence devant les mosaïques…
Et la suite ?
En ayant terminé Paris et en ayant flashé 13 autres villes, même si certaines sont partielles, mon rythme va forcément baisser. Un nouveau petit grain de folie risque d’éclore dans ma tête en 2021 si la situation sanitaire le permet, pourquoi ne pas faire un aller-retour à Marseille en TGV d’une journée ? Ou Londres ? Et surtout, prendre le temps d’observer de nouveau les oeuvres, d’apprécier les plus belles à leur juste valeur.
Pour me rassurer, je me dis que je suis encore loin des copains qui organisent leurs vacances en fonction des Invaders, mais la folie est toute relative.
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